23/11/2023 4 Minutes read

Accessibilité numérique et sanctions légales en France : faisons le point

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Depuis le début des années 2000, le cadre légal européen autour du handicap évolue pour protéger l’ensemble des citoyens et citoyennes de l’Union. Ces évolutions ont notamment permis de reconnaître que les situations de handicap vécues découlent de problèmes contextuels (infrastructure par exemple) plutôt que d’un problème lié à l’individu. Cette évolution du paradigme est importante et méritait d’être rappelée et saluée.

Dans l’Union européenne une fois une directive édictée, il est du ressort de chaque pays membre de la transposer dans son droit national, ce qui entraîne des différences d’entrée en vigueur ainsi que des différences dans l’application.

Malheureusement, il est à noter que la France est un des mauvais élèves (Handicap : la France, le mauvais élève de l’Europe) et si notre cadre légal évolue, cela se fait lentement. L’entreprise Koena, dans la foulée de sa conférence à A11Y Paris 2023 (A11Y Paris 2023) a fait un récapitulatif de la situation (Récapitulatif de la situation).

En 2019, nous vous avions proposé une infographie (Une infographie pour comprendre le cadre législatif de l’accessibilité) sur les obligations légales en France introduite par la loi de 2015 (et un décret de 2019). Depuis la situation a quelque peu évoluée et de nouvelles obligations sont apparues.

Quels sont les attendus ?

Ce qui était attendu des applications depuis 2019 concernait :

  • Une mention du niveau d’accessibilité sur l’ensemble des pages (dans le pied de page par exemple).
  • Une déclaration d’accessibilité normée (Déclaration d’accessibilité normée).
  • Un plan de mise en conformité pluriannuel (3 ans maximum).

L’absence de ces déclarations peut entraîner une amende de 25 000 € par site et par an pour les entités privées dotées d’un chiffre d’affaires annuel supérieur ou égal à 250 millions d’euros.

La nouveauté vient d’un renforcement du périmètre de « ce qui doit être accessible ». Précédemment, une application était évaluée comme une entité entière, délimitée par son propre périmètre. Dorénavant, un service dans son ensemble se doit d’être accessible, indépendamment du nombre de support utilisé pour accéder à ce service.

Par exemple, la SNCF se doit de s’assurer de l’accessibilité de son service (transport en train) de l’application de réservation et de consultation de billet, l’accès au train (les gares et la montée/descente), du voyage (le train en lui-même). Bref l’ensemble de la chaîne d’un service se doit d’être accessible.

En situation de non-conformité, une autre série de sanctions peut être déclenchée, atteignant jusqu’à 7 500 € pour une première violation (15 000 € en cas de récidive), voire la confiscation du service. Ces nouvelles exigences s’appliqueront dès juin 2025 pour les nouveaux services, et juin 2028 pour les services existants.

Pour aller plus loin sur ces évolutions, je recommande chaleureusement l’article récapitulatif de Temesis (Synthèse des nouvelles réglementations encadrant l’accessibilité numérique en France).

Et c’est tout ?

En ce qui concerne les services et applications au grand public en France, oui.

Mais attention à ne pas perdre de vue les applications internes, souvent négligées derrière un « c’est un site privé / intranet, pas besoin d’accessibilité numérique » ! Si vous n’êtes pas en mesure d’embaucher quelqu’un en raison d’un outil de travail inaccessible (votre CRM par exemple) alors vous risquez de vous exposer à des poursuites pour discrimination à l’embauche, et on sort de la simple amende pour rentrer sur du pénal (La protection contre les discriminations).

Le risque juridique est-il élevé ?

L’accessibilité numérique est un sujet qui gagne en visibilité chaque année. Il reste encore énormément à faire, à commencer par le cadre légal français qui doit finaliser la promulgation de décrets pour se conformer aux directives européennes.

Jusqu’à présent, aucun organe de contrôle étatique n’avait été désigné (le risque juridique était donc nul pour les obligations de déclaration) mais la situation évolue enfin et 5 agences ont été désignées (sur des segments spécifiques).

Ces entités vont devoir se saisir du sujet qu’est l’accessibilité numérique, mettre en place leurs processus et former leurs équipes. Tout cela va prendre du temps mais nous n’avons jamais été aussi proches de voir des sanctions pour défaut d’accessibilité tomber.

J’invite tous les acteurs du Web (commanditaire comme prestaire) à sérieusement se pencher sur la question et à ne pas attendre le dernier moment pour se mettre en conformité. La mise en conformité n’est pas un processus qui se règle en un jour, il s’agit d’un travail qui implique l’ensemble de la chaîne de réalisation et qui, pour être pérenne, va devoir nécessiter de former les équipes.

Si le risque d’être sanctionné est aujourd’hui très faible, attention au retour de bâton (les amendes liées au RGPD ont fini par tomber elles aussi).

Article écrit par Sébastien Picq
Twitter :
https://twitter.com/Kheltdire

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