10/11/2021 4 Minutes read Accessibilité 

L’accessibilité, une panacée ?

Si quelqu’un vous a déjà parlé d’accessibilité numérique, cette spécialité dédiée au support des technologies d’assistances aux utilisateurs handicapés, il est probable que cette personne vous ait également parlé des effets de bords vertueux (comme par exemple un meilleur référencement naturel) pour vous convaincre de l’intérêt de mener ces tâches. Tâchons d’y voir plus clair, et de comprendre de quoi on parle.

Au commencement fut le HTML

Pensé comme un moyen de mise à disposition de documents via un système de liens hypertextes (en opposition à une navigation par mot clé par exemple), l’objectif du protocole HTML est de faciliter l’accès à l’information.

Dès la première version publique, le HTML comporte des notions de sémantique et d’accessibilité : titre, alternative pour les images, etc. permettant d’organiser un document d’une manière compréhensible par les outils qu’utilisent les humains.

Ainsi dès son plus jeune âge, le web est voulu accessible par ses créateurs, d’abord sous un aspect recensant des initiatives individuelles, puis très vite en l’intégrant comme un projet à part entière au sein du W3C.

Le HTML — et les standards du W3C — reposent sur un principe qui permet à ce langage d’être interprété par une infinité d’outils dès lors que ceux-ci respectent la norme en place. Ce principe c’est l’interopérabilité.

Il existe de nombreux handicaps, chacun avec ses spécificités et ses solutions pour s’y adapter.

Par conséquent, il serait irréaliste de demander à chaque application d’implémenter un dispositif de navigation piloté par l’œil et ça tombe bien, personne ne le demande.

Les outils d’assistance techniques (lecteur d’écran, clavier braille etc.) s’en chargent pour vous en se servant de la norme HTML pour enrichir l’expérience de leurs utilisateurs.

La seule chose que vous ayez à faire est de correctement implémenter cette norme pour qu’une multitude d’outils fassent ce qui est nécessaire sans que vous n’ayez à vous en soucier.

Nous, participants à un projet web (que l’on soit commanditaire, designer d’interface ou développeur), devons respecter la norme édictée par le W3C. C’est ce qui nous permet de nous assurer que ce que nous produisons sera correctement interprété par les différents outils de l’écosystème, à commencer par les navigateurs mais également par les différentes technologies d’assistance.

Dit autrement, un défaut d’accessibilité est un bug qui doit être corrigé au même titre que n’importe quel problème d’implémentation de règle métier.

L’accessibilité aiderait le référencement, le taux de conversion, les performances des applications, et la repousse des cheveux : mythe ou réalité ?

Oui… et non.

Les effets de bords de l’accessibilité existent, mais ils sont inquantifiables. Peut-on alors dire, dans une approche économique/managériale, qu’ils existent vraiment ?

Oui, avoir une page proprement segmentée par des titres pertinents permettra aux robots d’indexation (Google, Bing etc.) de mieux qualifier un contenu pour le faire remonter dans les résultats pertinents. 

Mais, l’accessibilité ne dispense pas pour autant d’une stratégie de référencement si ce dernier est un objectif. De même que ne pas avoir d’objectif SEO (outil interne par exemple) ne dispense pas de structurer correctement ses pages (les titres permettant d’offrir des navigations alternatives via les technologies d’assistance).

Il se peut aussi que des recommandations SEO entrent en conflit avec des règles d’accessibilité. Un cas classique est l’introduction de mot clés dans l’alternatives des images de décoration : votre expert référencement vous dira que c’est bon pour votre classement, votre expert accessibilité vous indiquera que c’est un défaut d’accessibilité (car cela génère du “bruit” pour les technologies d’assistance).

Oui, faire en sorte qu’un utilisateur aveugle puisse acheter des produits sur un site e-commerce réduira peut-être le taux de rebond et augmentera le taux de conversion de cette population dans les outils d’analyse d’audience.
Mais quelqu’un est-il capable d’estimer le volume de cette cible, et de la détecter dans les rapports de trafic ?

Au-delà des métriques d’utilisation de votre produit, l’accessibilité est également un enjeu de réputation, notamment pour les entreprises sujettes à la loi de 2019 (en savoir plus sur le cadre législatif français) : qui doivent afficher sur chacune des pages leur niveau d’accessibilité. Pouvoir afficher “site conforme” plutôt que “site non conforme”, c’est meilleur pour l’image de marque (et la satisfaction des équipes ;p ).

Il est également de bon ton de communiquer autour de ses valeurs et/ou de sa politique RSE qui sont à la fois de bons vecteurs de présentation de l’entreprise ainsi qu’un aperçu de la vision du monde de votre entreprise. Le volet social du RSE intègre des enjeux comme la non discrimination et l’égalité dans l’entreprise, or si les outils que vous utilisez en interne, ou votre page de recrutement, ne sont pas accessibles vous pourriez de fait vous retrouver dans une situation de discrimination à l’embauche.

Faire de l’accessibilité numérique un véritable sujet au sein de votre entreprise aura un impact sur vos clients mais également sur vos équipes en leur permettant de donner un sens supplémentaire à leur travail, ainsi qu’en diversifiant les profils de vos collaborateurs et collaboratrices ce qui profitera à tous et toutes.

Si vous souhaitez augmenter le taux d’adoption de votre produit auprès des populations sujettes à un handicap, alors comme pour tout autre cible, il faudra mener des actions de communication spécifiques : rendre votre application accessible n’est qu’un pré-requis, pas une finalité commerciale.

Oui, prendre en compte l’accessibilité aura des effets de bords vertueux, mais bien malin celui ou celle qui pourra faire une projection chiffrée des gains économiques car ceux-ci sont intriqués à l’ensemble des décisions prises au cours du projet (développement produit, UX, UI, développement applicatif…). 

Lorsque que l’on mène des actions pour le référencement c’est d’abord pour atteindre des objectifs de référencement, “peu importe” si il y a des effets de bord vertueux ; de même, lorsque l’on travaille sur l’accessibilité de notre produit, c’est d’abord pour en améliorer l’accessibilité : tant mieux si il y a des effets de bord vertueux, mais ce n’est pas eux que l’on doit viser au travers de ces actions.

Conclusion

L’accessibilité est un sujet à part entière, qui dépasse même votre produit, qui s’établit à l’échelle de votre entreprise et qu’il convient donc de traiter avec les moyens adaptés.

Non, l’accessibilité numérique n’est pas la réponse magique à toutes les problématiques d’une application web.

Non, votre site devenu conforme aux standards d’accessibilité ne fera pas bondir votre chiffre d’affaires magiquement. Si vous avez des objectifs commerciaux spécifiques aux populations en situation de handicap, alors comme pour les autres cibles de population, il faudra déployer des campagnes spécifiques afin d’aller chercher ce public :

The true ROI from accessibility is to not only make your website more accessible but to also market to people with disabilities.

— Karl Groves.


Comme dit précédemment : le respect des normes d’accessibilité n’est que la première étape.

Oui, un site accessible ne fait fuir des prospects incapables d’utiliser votre service.

Oui, sa mise en œuvre peut aller dans la même direction que les recommandations des autres corps de métier, comme elle peut nécessiter des arbitrages.

Oui, un site accessible est un témoin de qualité de l’ensemble de la chaîne de production.

L’accessibilité est là – et ce depuis la conception même du web – pour permettre à l’ensemble de la population d’être autonome sur votre application, et c’est déjà une (belle) mission à part entière.

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